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Janvier 2002 Manifestation
contre l'«épuration de guerre»
Dans la soirée du 28 novembre dernier, à Manhattan, quelque 300 manifestants se sont rendus au Hunter College pour protester contre l’augmentation raciste des droits d’inscription qui vise les étudiants immigrés sans papiers de l’université de la ville de New-York (City University of New York – CUNY). Le rassemblement a aussi dénoncé la menace du « Student Data Collection System » [système de collecte de renseignements sur les étudiants] mis en place par le bureau fédéral de l’immigration (Immigration and Naturalization Service – INS). Ces deux mesures font partie du front intérieur de la « guerre globale » lancée par Washington. Cette importante manifestation contre l’« épuration de guerre » représente un pas significatif vers une lutte de classe contre cette guerre qui prend notamment pour cibles les travailleurs, les minorités opprimées et les immigrés. Les manifestants scandaient : « Le bureau d’inscription, fait-il partie de l’INS? » et « Pleins droits de citoyenneté pour tous les immigrés ! » Au même temps que le bombardement terroriste US de l’Afghanistan, le FBI organise des rafles de milliers d’Arabes pour leur faire subir des interrogatoires « volontaires », et les inquisiteurs réactionnaires préparent des listes noires de « professeurs antipatriotes ». L’administration de CUNY collabore à l’« effort de guerre » en s’attaquant à ses propres étudiants, chassant de l’enseignement des milliers, voire des dizaines de milliers d’étudiants immigrés. Son plan cynique est d’imposer une augmentation énorme des droits d’inscription, jusqu’à 6800 dollars par an, une somme que ne peut payer presque aucun des étudiants de cette université « publique » qui, dans leur grande majorité, viennent de familles pauvres et ouvrières. La manifestation, dont l’Internationalist Group a été à l’initiative, a été un front unique qui a rassemblé des dizaines de groupes étudiants, d’organisations pour la défense des droits des immigrés, des syndicalistes, des groupes socialistes – entre autres – dans une action commune en défense des étudiants immigrés. Sur les campus du Hunter College et de La Guardia Community College, une douzaine de clubs et de gouvernements étudiants ont soutenu la manifestation. Un autre foyer de l’organisation de cette manifestation a été le Bronx Community College, que le New York Times a déjà remarqué pour être un centre d’opposition à la guerre contre l’Afghanistan et où le Revolutionary Reconstruction Club a organisé un cortège. Le professeur Bill Crain du City College a été le premier orateur : « Il faut que les études supérieures soient considérées comme un droit humain fondamental. Les immigrés sans papiers viennent ici en croyant que, s’ils travaillent dur et font des sacrifices, ils peuvent se cultiver et avoir une chance pour l’avenir. Voilà ce que l’on leur enlève, de façon perverse et cruelle. Nous devons nous élever contre cela. » Un étudiant chinois, Wu Xiong, a prononcé un plaidoyer passionné : « À cause de l’Afghanistan, il y a une réaction pour laquelle nous ne sommes absolument pas responsables. Je parle pour nous tous ici – Asiatiques, Afro-Américains, blancs, Hispaniques », disant : « C’est une injustice que nous ne pouvons pas accepter. » Paula du Club des Colombiens à Hunter a déclaré : « Nos parents nettoient les maisons, ils tondent les pelouses, ils lavent les voitures, ils font tous ces travaux que personne d’autres ne veut faire. Ces boulots ne sont pas bien payés; ça ne suffit pas pour payer l’éducation, la nourriture et les autres besoins de base. Je connais beaucoup de gens qui seraient obligés de quitter l’école à cause de cela. » Daniel Tasripin du Student Liberation Action Movement a ajouté : “Le message qui est envoyé aux immigrés, avec ou sans papiers, c’est que l’Amérique aime votre travail, les fringues de Calvin Klein que vous fabriquez et les fraises que vous cueillez – on aime ce travail, mais on n’aime pas les travailleurs. Qu’importe si l’on est venus ici avec papiers, sans papiers, sur un navire d’esclaves, ou autrement, nous ne pouvons pas faire confiance que nos droits nous seront donnés; il faut que nous nous battions pour ces droits. » Fait significatif, en plus des étudiants venus d’au moins huit campus de l’ensemble universitaire CUNY, il y avait bon nombre d’ouvriers immigrés présents, appartenant à des syndicats et des groupes de solidarité qui ont soutenu et qui ont activement aidé à construire la manifestation. José Schiffino, membre de la section locale 169 du syndicat UNITE et organisateur de la campagne de syndicalisation dans le commerce de l’alimentation, a envoyé un message qui a été lu aux manifestants : « Notre gouvernement mène une guerre ici et maintenant. Je ne parle pas de la ‘guerre contre le terrorisme’, je parle de la guerre que ce gouvernement mène ici même contre nous : la guerre contre les travailleurs pauvres, la guerre contre les immigrés […]. Ils veulent augmenter les droits d’inscription pour vous expulser. Ils veulent donner vos noms au gouvernement et ils veulent vous traquer comme si vous étiez des criminels ». Cleo Silver a pris la parole au nom de Workers to Free Mumia Abu-Jamal [Ouvriers pour libérer Mumia Abu-Jamal]. Mumia est l’ancien Black Panther qui est emprisonné dans le couloir de la mort en Pennsylvanie depuis dix ans. Elle a souligné que ce brillant journaliste radical, menacé d’être exécuté dans ce climat d’hystérie réactionnaire, a courageusement dénoncé la guerre contre Afghanistan et la destruction des droits démocratiques aux Etats-Unis. Silver a rappelé l’époque où il n’y avait pas de droits d’inscription à CUNY : « Les étudiants afro-américains d’origine ouvrière ont lutté pour cela, et nous l’avons revendiqué. Nous avons obtenu les inscriptions libres – nous avons combattu pour cela […]. Nous allons vous aider à l’obtenir à nouveau ! Les travailleurs se proposent de s’unir aux étudiants. » Pour l’Internationalist Group, Jan Norden a fait remarquer que l’« augmentation des droits d’inscription », qui vise à expulser les étudiants immigrés soi-disant sans papiers, « est le même genre d’épuration que les nazis ont réalisée en Allemagne, quand ils ont mis en place un numerus clausus pour réduire le nombre de Juifs ; ensuite, ils les ont expulsés de toutes les universités. » Il a souligné que l’« épuration de guerre » de CUNY est inséparable de la guerre, dans laquelle il faut lutter pour « la défaite de l’impérialisme US et la défense de l’Afghanistan et de l’Irak ». Norden a appelé à la construction d’un parti ouvrier révolutionnaire, capable de mobiliser la seule force sociale – la classe ouvrière racialement intégrée, noire, latino-américaine, asiatique, blanche et immigrée – qui pourra « vaincre ces bellicistes en renversant leur régime et en réalisant la révolution socialiste internationale ». Les manifestants ont crié leur détermination à ne pas laisser passer cette mesure scandaleuse. Ils ont scandé avec force : « INS, FBI, CIA, bas les pattes! ¡Migra fuera! » et « A bas ‘l’épuration de guerre’! ». Le rassemblement a pris fin avec le mot d’ordre « Asiatiques, Latinos, Noirs, Blancs – ouvriers du monde entier, unissez-vous! » et le serment de barrer la route aux inquisiteurs et autres « purificateurs » racistes.
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