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février 2004 Le Maroc et l’ONU hors du
Sahara occidental ! Pour l’indépendance immédiate et
sans condition du Sahara occidental !
Parallèlement à l’occupation coloniale de l’Irak, approuvée
a posteriori par les Nations Unies, les impérialistes entendent aussi
« pacifier » divers points « chauds » de l’Afrique
(comme le Soudan ou le Congo), et y compris « régler »
la question du Sahara occidental. Le peuple sahraoui, qui a lutté pendant
plus de 40 ans pour son indépendance, d’abord contre les colonialistes
espagnols et français et, depuis 1975, contre l’armée d’occupation
marocaine, est menacé de disparition. Son droit à l’existence
en tant que nation, affirmé par plusieurs résolutions onusiennes,
est enterré par un plan américain qui projette une « autonomie
» bidon sous la botte de la monarchie chérifienne. Le secrétaire
général de l’ONU, Kofi Annan, veut une réponse du Maroc
avant le 30 avril (Le Matin [Alger], 24 janvier 2004). Un guérrillero du Front Polisario.
Le mouvement indépendantiste sahraoui (le Front Polisario) a déjà donné son aval à cette résolution suicidaire. Pourquoi ? Sous tutelle du régime algérien, le Polisario a depuis longtemps enchevêtré la lutte sahraouie aux querelles qui opposent les deux Etats bourgeois maghrébins. Aujourd’hui, après la faillite du nationalisme de « gauche » tiers-mondiste, où l’on voit un Kadhafi ramper devant les USA et renoncer aux « armes de destruction massive » qu’il ne possède même pas, le régime algérien se rapproche des USA. Sans rompre avec leurs parrains traditionnels de l’Elysée, tous les régimes du Maghreb occidental – y compris la République arabe démocratique sahraouie (RASD) du Polisario – se bousculent pour obtenir les faveurs de la Maison Blanche. Pour Washington, le Maroc est la pierre angulaire de son emprise grandissante sur l’Ouest africain, tant militaire que politique. Selon le Wall Street Journal (29 janvier 2004), la monarchie du roi Mohammed VI est destinée à servir de « cas test de la démocratie arabe » - sous haute surveillance – pour les pays sémi-coloniaux. En même temps, les stratèges géopolitiques de l’impérialisme US veulent améliorer les relations algéro-marocaines et construire ainsi un ensemble maghrébin, sous sa domination, situé sur le flanc sud de l’OTAN. L’impérialisme français voit d’un mauvais œil ce braconnage sur ses « chasses gardées » et encourage la monarchie marocaine dans les hésitations qu’elle manifeste devant les nouveaux projets américains (sans s’y opposer ouvertement). Le Plan Baker II, approuvé par l’ONU en juillet 2003, veut légitimer l’annexion marocaine du Sahara occidental. C’est aujourd’hui le but de la mission de l’ONU dans le Sahara occidental, le MINURSO. Le résultat de cette opération de poudre aux yeux sera d’abandonner les quelque 200 000 Sahraouis enfermés dans les camps de réfugiés près de Tindouf ; ils seront soit condamnés à la réclusion à vie dans le désert, soit contraints de se soumettre à l’occupation de leur pays par 160000 hommes de troupe (et encore plus de colons marocains), soit obligés d’émigrer vers un pays voisin comme la Mauritanie, où sévit toujours l’esclavage. Face à ces machinations impérialistes pour annexer « en douceur » le Sahara occidental au royaume du Maroc, nous trotskystes disons : A bas le Plan Baker ! Opposée à toute oppression nationale, la Ligue pour la Quatrième Internationale réclame l’indépendance immédiate et inconditionnelle du Sahara occidental vis-à-vis du royaume du Maroc. Et la condition préalable aujourd’hui à l‘indépendance du Sahara occidental, c’est le retrait immédiat de toutes les troupes impérialistes et marocaines stationnées sur ce territoire. Il faut lutter aussi pour la libération de tous les prisonniers sahraouis victimes de l’oppression nationale monarchique. Et alors que les nationalistes ne peuvent qu’essayer de s’accommoder avec les régimes bourgeois régionales et leurs patrons impérialistes, les révolutionnaires prolétariens luttent pour la révolution ouvrière qui les renversera et pour une fédération socialiste du Maghreb. Le « Plan Baker II » Déjà en 1997, Kofi Annan avait fait de James Baker (ancien secrétaire au Trésor de Ronald Reagan et ancien secrétaire d’Etat de George Bush I) son envoyé spécial pour trouver une « solution » à la question du Sahara occidental. Baker (tout comme l’actuel ambassadeur US au Maroc) entretient des liens étroits avec le trust énergétique US Kerr McGee – qui a signé un accord avec le Maroc en 2001 pour chercher du pétrole dans les eaux territoriales revendiquées par ce pays. Le rôle de l’ONU comme feuille de vigne pour les menées impérialistes ne peut pas être plus clair. En dépit de son nom, ce nouveau plan de Baker pour « l’autodétermination du peuple du Sahara occidental » n'est rien d’autre qu’une version relookée de la proposition marocaine d’« accord-cadre » que Baker avait déjà avancée et qui s’oppose à une véritable autodétermination du peuple sahraoui. Ce plan propose, à nouveau, de décider du statut du Sahara occidental via un référendum, mais cette fois après une période d’autonomie factice sous une Autorité du Sahara occidental (l’ASO) contrôlée par le Maroc. En plus, il y a la pierre d’achoppement de qui votera. Le plan envisage d’inclure tous qui vivent sur le territoire depuis 1999, ce qui accepte l’immigration massive organisée par le gouvernement de Rabat. (De toute façon, James Baker est expert ès référendums truqués, lui qui avait été chargé par George W. Bush de diriger en Floride la « guerre des recomptes » des bulletins de votes qui lui avait assuré la présidence américaine.) Le plan envisage un accord entre le royaume du Maroc et le Front Polisario, auquel se joignent l’Algérie et la Mauritanie en tant que pays voisins. Selon le statut de l’ASO, cette « Autorité » aura sous sa responsabilité les domaines de l’administration locale et du budget territorial, alors que le makhzen (le pouvoir central marocain) gardera la « sécurité nationale » (y compris la détermination des frontières maritimes et terrestres, et leur protection par les « moyens appropriés »). De plus, il aura en charge la production, la vente, la possession et l’emploi d’armes ou d’explosifs, ainsi que la défense de l’« intégrité du territoire du Sahara occidental » contre toute tentative « scissionniste ». Cela signifierait tout simplement la fin de la RASD
; une fraction du Polisario, après le lâchage du régime
algérien, intégrerait les rangs de tous les autres «
opposants » marocains impuissants et corrompus qu’entretient le makhzen.
Une véritable autonomie nationale est impensable non seulement sous
cette monarchie – où aucun droit démocratique n’est garanti
– mais plus généralement à l’époque impérialiste,
et surtout dans les pays coloniaux et sémi-coloniaux. Manquant de
bases économiques pour une véritable intégration, ces
pays ne peuvent maintenir l’« unité nationale » qu’avec
un régime de fer (et, sous le capitalisme, l’alternative est plutôt
la guerre ethnique fratricide). Aucun Etat bourgeois maghrébin ne
peut se permettre ce « luxe » et aucun n’accorde de droits véritables
à ses populations amazighes (de langue berbère). Le trust français TotalFinaElf a aussi signé
un contrat pour la prospection pétrolière aux larges des côtes
du Sahara occidental. Et le nom « TotalFinaElf » est synonyme
de corruption et pillage en « Françafrique » – un «
bras séculier d’Etat » comme dit Le Monde (13 novembre
2003). Son imbrication avec les services de renseignement, les militaires
et les mercenaires est notoire. Les initiatives US mettent la France, un impérialisme
de deuxième zone, sur la défensive. Ainsi, Chirac lance de
nouvelles expéditions colonialistes en Afrique noire (dernièrement
en Côte d’Ivoire) et a visité le Maroc en octobre 2003 (accompagné
par le gratin du capitalisme français) pour assurer le roi Mohamed
VI de son soutien « sans réserve ». Au-delà des
liens personnels entre Chirac et son père, Hassan II (et l’étroite
collaboration entre les barbouzes de la DGSE et les services marocains formalisée
dans des accords de coopération qui portent des noms grotesques
comme « Safari club » ou « Club Méditerranée
»), l’impérialisme français s’accroche désespérément
à ce pilier de sa politique africaine en se servant de ces liens
et en confortant les réticences marocaines à accepter même
un référendum bidon au Sahara occidental. Carte: www.sahara-occidental.com L’impasse du Polisario Déjà en 1965, la puissance coloniale espagnole est priée par l’ONU d’organiser un référendum pour permettre au peuple sahraoui d’exercer librement son droit à l’autodétermination. Néanmoins, Madrid ne décidera pas à se séparer tout de suite de sa colonie, car le territoire du Sahara occidental n’est pas un simple tas de sable. Ce pays renferme d’importantes ressources ; il possède un des plus grands gisements de phosphate du monde, son sous-sol contient aussi du cuivre, du fer, de l’uranium, voire du pétrole, et ses côtes évaluées à 150000 km2 recèlent d’importants bancs de pêche. Entre 1953 et 1956, des milliers de Sahraouis ont
combattu le colonialisme français au Maroc. Une fois l’indépendance
marocaine gagnée, ils continuèrent au Sud la lutte pour chasser
le colonialisme espagnol des territoires d’Ifni, de Tarfaya et du Sahara.
Le roi Hassan (bien que revendiquant non seulement le Sahara mais aussi
la Mauritanie) les a poignardés dans le dos, comme le raconte Gilles
Perrault dans son livre Notre ami le roi (Gallimard, 1990): « En janvier 1958, Français et Espagnols, en accord complet avec les autorités marocaines, mettent au point l’opération Ouragan, dont la partie française s’appellera Ecouvillon. Le mois suivant, quinze mille hommes, appuyés par une centaine d’avions, ratissent le désert. Les tribus sahraouies, leurs troupeaux abattus, sont contraintes à l’exode. Les combattants, écrasés, se rendent et, pour la plupart rejoignent les FAR [l’armée royale] ou rentrent chez eux. » Comme dans le cas des enclaves espagnoles de Ceuta
et Melilla, et comme dans le cas de la Mauritanie (qui s’est vue accorder
son indépendance formelle sous la houlette du néocolonialisme
français), les prétentions chérifiennes ne s’appliquaient
qu’aux populations indigènes et non aux anciens maîtres coloniaux
! Le 11 juin 1970, une manifestation pacifique de
masse à El-Ayoun réclame de nouveau l’indépendance du
Sahara occidental. Aussitôt, les forces coloniales répondent
par la répression et la terreur. Le 10 mai 1973, d’anciens membres
du mouvement de libération sahraoui et des étudiants créent
le Mouvement populaire de libération de Saguia el-Hamra et du Rio
de Oro (Polisario). La lutte armée reprend. Une année plus tard, Madrid cède
et promet un référendum sur l’autodétermination ; mais
le Maroc et la Mauritanie s’opposent à l’indépendance et,
en janvier 1975, les colonialistes espagnols décident l’ajournement
du rendez-vous référendaire. Le Polisario et son aile militaire,
l’Armée de libération du peuple sahraoui (ALPS), intensifient
leurs attaques contre les garnisons espagnoles. En 1975, ces actions ouvrent la voie à des
négociations qui aboutissent, le 24 mai de la même année,
à l’annonce faite par le général Gomez de Salazar (gouverneur
du Sahara occidental) d’un plan d’évacuation du territoire. Mais,
en 1975, Madrid conclut secrètement avec le Maroc et la Mauritanie
un accord de partage, tout en s’assurant une contrepartie économique
et territoriale au Nord du Maroc. Hassan II déclare son intention d’organiser
la « Marche verte » pour récupérer « ses
» provinces. En octobre 1975, le Maroc annonce l’invasion militaire,
et 35000 Marocains brandissant le Coran et les portraits du roi chérifien
se mettent en marche. Il s’agit de créer une atmosphère hystérique
d’« union sacrée » qui englobe aussitôt non seulement
les « opposants » de l’Union socialiste des forces populaires
(USFP – parti nationaliste bourgeois de « gauche ») mais aussi
les staliniens véreux du Parti du progrès et du socialisme
(PPS). Le PPS – pro-Moscou mais surtout pro-Hassan – s’est vu accorder un
quotidien pour fustiger les « mercenaires » du Polisario. C’est le début d’une longue guerre entre
le Front Polisario et les Forces armées royales (FAR) de Hassan II.
Le Front, qui s’appuie sur les réfugiés installés dans
des camps au Sahara occidental et à Tindouf au Sud-Ouest algérien,
doit faire face à la fois aux FAR et aux forces armées mauritaniennes
(mais ces dernières abandonnent bientôt le champ de bataille).
Au début de l’année 1976, l’aviation marocaine s’attaque aux
civils sahraouis à Oum Dreiga, Tifarite, Amgala et Guelta en les
bombardant au napalm. Le Polisario dépend de plus en plus de l’Algérie
de Boumediene, et il est financé par l’argent de Kadhafi. Mais le
soutien algérien à la cause sahraouie n’est pas, comme le prétend
le sanguinaire régime nationaliste bourgeois algérien, une
défense des droits des peuples en lutte. Le rêve d’une unité
nord-africaine, qu’ont entretenu deux générations de nationalistes
anticolonialistes, vole en éclats avec ces deux Etats bourgeois –
une dictature militaire pseudo-socialiste et une monarchie réactionnaire
– qui se disputent l’hégémonie du Maghreb : « Dans les deux pays, l’exploitation du nationalisme est devenue une ressource politique dans la compétition pour le pouvoir, d’où la difficulté d’une solution au conflit du Sahara occidental. Pour la monarchie, la perte du Sahara aurait signifié la chute du trône ; le roi Hassan II était donc prêt à se battre pour l’ancienne colonie espagnole jusqu’au dernier Marocain. Pour les généraux algériens, la surenchère nationaliste est un élément de leur pouvoir, et le premier d’entre eux qui ferait preuve de modération serait disqualifié. » Dans une guerre ouverte entre l’Algérie et
le Maroc, la lutte sahraouie aurait été subordonnée
à une lutte sordide entre deux Etats bourgeois clients de l’impérialisme
dans laquelle les marxistes révolutionnaires n’avaient aucun parti
à prendre. Lors de la « guerre des sables » de 1963 entre
le Maroc et l’Algérie, les opportunistes du Secrétariat unifié
(SU) – qui prétendaient voir dans l’Algérie de Ben Bella un
« gouvernement ouvrier et paysan » en rupture avec le capitalisme
– se rangèrent derrière Ben Bella. Les trotskystes authentiques,
par contre, prenaient une position de défaitisme révolutionnaire
des deux côtés. A partir de novembre 1977, la France impérialiste
s’engage aux côtés des FAR et bombarde au napalm les unités
de l’ALPS à l’aide d’avions Jaguar et Breguet-Atlantique. Après
avoir tué et torturé plus de deux millions d’Algériens
pendant la Guerre d’Algérie, l’impérialisme français,
une fois de plus, montre son vrai visage. Le soutien à Rabat s’explique
par ses anciens liens avec la monarchie et par les intérêts
du capital français dans le royaume. Les 160000 soldats des FAR n’arriveront pas à
mater la résistance sahraouie (qui fera plus tard l’objet d’une étude
du Pentagone). L’ordre est donné aux FAR d’abandonner une partie
du territoire et de limiter leur présence aux seules régions
jugées utiles, en les entourant de ceintures défensives, champs
de mines, barbelés et murs défensifs. Le Maroc adapte ses
forces armées à celles de l’ALPS, opte pour la contre-guérilla
et constitue des détachements d’intervention rapide. Au niveau militaire, c’est l’impasse. La guérilla
n’arrive pas à chasser les FAR, mais le coût de la guerre pèse
aussi sur la monarchie marocaine. En 1981, il y a des soulèvements
populaires spontanés dans les villes contre la vie chère.
Néanmoins, grâce à un système de répression
à grande échelle, et grâce aussi à l’appui des
partis nationalistes bourgeois et des staliniens du PPS, la monarchie arrive
à stabiliser le « front intérieur » – alors que
la défaite de la monarchie aurait tout à fait servi les intérêts
des masses opprimées. A l’époque, il n’y avait que des éléments
maoïstes pour réclamer l’autodétermination ou même
l’indépendance du Sahara occidental. Ces prétendus « marxistes-léninistes » sont disloqués par les arrestations et les tortures ; par ailleurs, les maoïstes avancaient un programme de « révolution par étapes » en totale contradiction avec Marx et Lénine et pas moins stalinien que celui du PPS, en dépit de leur langage « gauchiste ». Ce programme de collaboration de classes empêche la mobilisation du prolétariat marocain et de tous les opprimés dans une lutte révolutionnaire contre la monarchie, l’impérialisme et le capitalisme lui-même. La plupart d’entre eux se retrouvent aujourd’hui social-démocratisés dans la Gauche socialiste unifiée (GSU), laquelle donnait un « appui critique » au gouvernement de Abderrahmane El Youssoufi (1998-2002) de l’USFP et préconise « une monarchie parlementaire » (Houria Chérif Haouat, membre du comité central, dans L’Humanité, 30 septembre 2002). La GSU, propose, elle aussi, l’« autonomie » du Sahara. En 1981, Hassan II doit quand même faire de
nouvelles promesses d’un référendum sur le Sahara devant l’Organisation
de l’unité africaine (tout en poursuivant sa sale guerre et en érigeant
des murs dans le territoire occupé, autour des sites stratégiques).
Il faut attendre juin 1990 pour assister à la publication du plan
de règlement ONU-OUA prévoyant la tenue d’un référendum
en juin 1992, reposant sur le recensement colonial espagnol de 1974. Mais,
le Polisario remet en cause le recensement colonial. La bataille autour
des critères d’identification du corps électoral est au cœur
de l’enjeu. L’ONU va jouer la carte du compromis, obligeant le Polisario
à faire des concessions. En 1997, le Maroc et le Polisario signent
les accords de Houston prévoyant un scrutin pour fin 1998. Ces accords
reposent sur un nouveau compromis, identifiant 150000 personnes présentées
par le Maroc. Quelques semaines plus tard, Rabat viole une clause de ces
accords. Mais ces dizaines d’années de lutte montrent que la population
saharienne a déjà fait son choix, quel que soit le règlement
imposé par les impérialistes. Fédération socialiste
du Maghreb contre recolonisation impérialiste Aujourd’hui, la presse algérienne aux ordres
crie à la victoire pour essayer de couvrir l’abandon des Sahraouis
au Maroc. « Comment Alger a piégé Rabat » titre
par exemple le Quotidien d’Oran (16 juillet 2003), qui se gargarise
des bons rapports entre Alger et la Maison Blanche aux dépens du Maroc.
De plus, le Quotidien d’Oran annonce : « Au même moment,
le président Mohamed Abdelaziz [de la RASD] s’envole en cette matinée
du 15 juillet en direction de… Washington. Invité par des Congressmen
américains du Parti républicain et des associations américaines
pour l’indépendance, le président sahraoui voit sa position
se renforcer. » Vain espoir. Pour sa part, la presse marocaine aux ordres se
délecte de l’abandon par le Polisario de son langage « révolutionnaire
» d’antan et fait allusion (quelle hypocrisie !) aux subsides versés
par Boeing au Polisario. Le Polisario, comme tous les autres nationalistes
petits-bourgeois, a jeté depuis longtemps sa rhétorique de
« gauche » aux orties et cherche à ériger un Etat
bourgeois client de l’impérialisme. Au dernier congrès du Polisario,
un certain mécontentement s’est exprimé sur la question du
cessez-le-feu, mais la bourgeoisie algérienne est prête à
mater toute rébellion. Un simple retour aux grands jours de la lutte
armée est d’ailleurs impossible ; plus que jamais le sort du peuple
sahraoui est étroitement lié à la lutte pour mobiliser
les prolétariats algérien et marocain contre leurs gouvernements
capitalistes néo-coloniaux respectifs. Si la collaboration militaire entre l’Algérie
et l’OTAN se développe, les USA décident aussi de quadrupler
leur « assistance non militaire » – c’est-à-dire policière
– au Maroc (40 millions de dollars à partir de 2004), afin de «
combattre le terrorisme ». L'aide militaire américaine au royaume
sera doublée et portée à 20 millions de dollars. Ainsi,
il ne s’agit nullement d’un bloc algéro-américain contre le
Maroc, mais d’une lutte pour l’influence entre les impérialistes
US et français au Maroc comme en Algérie. Vu les liens grandissants
entre les USA et le Maroc, il est plus que probable que les réticences
marocaines devant le Plan Baker II (qui contient quelques vagues références
à une éventuelle « indépendance » du Sahara
occidental) vont disparaître, en dépit de tous les efforts
déployés par Chirac. Par ailleurs, tout en condamnant le contrat
accordé à TotalFinaElf, Abdelaziz promet l’ouverture du Sahara
occidental au « capital français » si l’impérialisme
français prend ses distances avec la monarchie chérifienne. Il est profondément vrai qu’un Sahara occidental
indépendant, en dépit de ses richesses naturelles, resterait
un Etat pauvre pillé par l’impérialisme. La géographie
exige impérativement une collaboration économique rationnelle
entre les pays maghrébins (par exemple le projet d’un pipe-line du
gaz algérien passant par le Maroc pour relier l’Europe). Mais toutes
les tentatives d’intégration économique maghrébine
sont mort-nées – ou aggraveraient le pillage de ces pays par l’impérialisme
US ou par ses rivaux européens. La domination du Maroc sur le Sahara
occidental repose sur le soutien des criminels impérialistes américain
et européens qui se présentent aujourd’hui comme des garants
de l’autodétermination pour peuple sahraoui – les mêmes impérialistes
qui organisent l’occupation coloniale de l’Irak !
Le peuple sahraoui a été
réduit à une existence effrayante. Toute une génération
de jeunes ne connaît que la vie des camps de réfugiés
de Tindouf, qu’ils ont habités ces dernières 20 années.
Très petit peuple, il ne peut pas gagner avec ses seuls effectifs
la bataille contre l’énorme machine de guerre marocaine. Obligés
à chercher l’appui de forces plus puissantes, les dirigeants du Front
Polisario se sont faits clients du sanguinaire régime algérien,
en en appelant à l’ONU et aux impérialistes européens
et américain. Ils rêvent peut-être que le Sahara occidental
suive le même chemin que le Timor oriental, pays indépendant
sans industrie où la population vit dans la misère, habitant
des cahutes alors que les anciens chefs du mouvement de libération
FRETILIN occupent les bâtiments de l’ancien gouverneur indonésien.
En tout cas, c’est très peu probable dans le contexte actuel, où
les combattants pour l’indépendance sont traités comme des
« terroristes ». Mais les Sahraouis ne sont pas condamnés
à une recherche éternelle d’un parrain impérialiste.
Leur destin ne doit pas être celui d’un peuple martyrisé. Ils
peuvent jouer un rôle central dans le réveil du puissant prolétariat
maghrébin, dans sa prise de conscience de classe dans une lutte acharnée
contre l’emprise du nationalisme qui l’a divisé et enchaîné
à ses exploiteurs. L’émancipation nationale du peuple sahraoui
n’est possible que dans le combat contre l’impérialisme et la réaction
« nationale ». Les femmes sahraouies qui ont largement participé
à la lutte pour l’indépendance sont menacées, de même
que leurs sœurs marocaines et algériennes, par les islamistes, la
monarchie chérifienne et les bourreaux nationalistes au pouvoir à
Alger. La lutte pour leur libération doit être partie intégrante
d’une lutte révolutionnaire pour l’émancipation des travailleurs,
de la lutte des exploités et opprimés contre leurs exploiteurs
et oppresseurs. Les habitants des camps de réfugiés dans le
désert saharien, tout comme les habitants des bidonvilles autour
de Casablanca et des autres grandes villes, ont un besoin urgent d’une direction
à la classe ouvrière guidée par le programme de la
révolution permanente qui s’étende au cœur des
métropoles impérialistes. Une lutte de classe des travailleurs
américains, britanniques, espagnols et italiens contre la guerre
impérialiste en Irak et en Afghanistan ainsi que les luttes des ouvriers
français contre leur propre bourgeoisie seront décisives pour
décider du sort des affamés et des damnés de la terre
nord-africaine. La Ligue pour la Quatrième Internationale insiste que c’est surtout le prolétariat marocain qui est, avec ses frères algériens, tunisiens et libyens, l’allié du peuple sahraoui. Etant donné que le Maroc et tous les autres pays du Maghreb sont des pays bourgeois à développement économique retardataire, la solution complète et véritable à leurs revendications démocratiques et leur libération nationale du joug de l’impérialisme ne peuvent être que la dictature du prolétariat qui prend la tête de la nation opprimée, avant tout de ses masses paysannes, dans une fédération socialiste du Maghreb. Pour cela, il faut construire des partis révolutionnaires de type bolchevique pour instaurer et consolider un régime prolétarien au Maghreb et pour aider à allumer l’étincelle révolutionnaire à l’intérieur des pays des anciens et nouveaux colonisateurs. Face à l’impérialisme, il faut une lutte à l’échelle internationale pour la révolution socialiste, notamment en France et au USA. n Pour contacter la Ligue pour la Quatrième Internationale ou ses sections, envoyez un courrier electronique à: internationalistgroup@msn.com |
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